I. LES FAITS ET ANTECEDENTS DE PROCEDURE
1. La SA SWITCH est une agence de voyages, un tour opérateur, qui propose divers voyages par l’intermédiaire de sites Internet.
2. Madame FO a contacté la SA SWITCH par téléphone et, le 1er février 2006, elle a signé une demande d'inscription pour un voyage « All Inclusive » (vols, transferts et hôtel en pension complète) à Fuerteventura (Iles Canaries) du 26 février au 5 mars 2006, pour deux adultes et un enfant, et pour la somme totale de 1.531 EUR. Ce prix comprend une assurance voyage complémentaire auprès de la compagnie ELVIA dont le siège social est situé en France. La demande d'inscription a été adressée par télécopie par madame FO à l’agence SWITCH le 1er février 2006. La SA SWITCH a émis une facture pour la somme totale de 1.531 EUR, montant acquitté par madame FO au moyen de sa carte bancaire qu'elle autorisait SWITCH à débiter pour ce montant.
3. Madame FO, sa mère, madame MZ, et son fils, ont pris l’avion à l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle en France. Le transport aérien a été réalisé par la SA XL AIRWAYS FRANCE (anciennement la société STAR AIRLINES) ayant son siège social en France. A leur arrivée à l’aéroport de Fuerteventura le 26 février 2006, mesdames FO et MZ n'ont pas pu récupérer un bagage. Un « constat d'irrégularité bagage » a été fait à l’aéroport. Mesdames FO et MZ ont eu divers contacts téléphoniques et/ou par télécopie avec le transporteur, l’agence de voyage et la compagnie d'assurances pendant tout leur séjour aux Iles Canaries pour tenter de récupérer le bagage, mais en vain. Le 2 mars 2006, la SA SWITCH a adressé une déclaration de sinistre à la compagnie ELVIA pour un retard supérieur à 24 heures dans la livraison des bagages de leurs clients. Le 6 mars 2006, de retour en Belgique, madame FO a envoyé un courrier recommandé au transporteur et à l’agence de voyage les invitant à retrouver le bagage dans les 24 heures. Le 8 mars 2006, madame FO a adressé une déclaration de sinistre à la compagnie ELVIA. Le 13 mars 2006, la SA SWITCH a adressé une déclaration de sinistre au transporteur pour la perte du bagage.
4. Par un acte signifié le 8 novembre 2006, mesdames MZ et FO ont cité l’agence de voyage et le transporteur aérien devant le tribunal de céans. Elles demandaient leur condamnation à restituer leur valise sous peine d'astreinte et la réparation de leur préjudice d'une somme de 5.792,34 EUR à titre provisionnel. La cause est inscrite sous le numéro de rôle général 06/5646/A. Par un acte signifié le 24 janvier 2007, mesdames MZ et FO ont cité la compagnie ELVIA devant le tribunal de céans. Elles demandaient sa condamnation à la réparation de leur préjudice d'une somme de 4.500 EUR à titre provisionnel.
La cause est inscrite sous le numéro de rôle général 07/933/A.
II. LES DEMANDES ACTUELLES
1. Les parties admettent que le bagage litigieux est définitivement perdu.
Dans leurs dernières conclusions, mesdames MZ et FO demandent la condamnation des défenderesses, solidairement ou l’une à défaut de l’autre, au paiement d'une somme provisionnelle de 6.992,34 EUR à titre de réparation du dommage subi et d'une somme forfaitaire de 10.000 EUR représentant le contenu du bagage perdu, à majorer des intérêts à partir du 27 février 2006 et des dépens. A titre subsidiaire, elles demandent la condamnation des défenderesses, solidairement ou l’une à défaut de l’autre, au paiement d'une somme de 4.500 EUR, sous déduction de la franchise de 90 EUR, et la condamnation de l’agence de voyage et du transporteur, solidairement ou l’un à défaut de l’autre, à une somme provisionnelle de 6.992,34 EUR et à une somme de 5.590 EUR, à majorer des intérêts et des dépens.
Elles postulent en outre l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
2. La SA SWITCH soulève l’incompétence territoriale du tribunal. A titre subsidiaire, elle conteste les demandes et introduit une action en garantie contre la SA XL AIRWAYS FRANCE. Elle conteste en outre la demande de la société ELVIA relative aux frais de procédure.
3. La SA AIRWAYS FRANCE soulève l’incompétence territoriale du tribunal et demande la condamnation de mesdames MZ et FO à l’indemnité de procédure. A titre subsidiaire, elle conteste les demandes dirigées contre elles, en ce compris le montant des indemnités de procédure.
4. La compagnie ELVIA conteste les demandes de mesdames MZ et FO et, subsidiairement, estime que seule une indemnité pour retard dans la livraison de bagages est due, soit 300 EUR. Elle introduit en outre une action subrogatoire et demande la condamnation in solidum des parties SWITCH et XL AIRWAYS FRANCE à lui rembourser toute somme qu'elle serait amenée à décaisser en faveur de mesdames MZ et FO, à majorer des dépens et frais de défense.
III. LA COMPETENCE TERRITORIALE
Mesdames MZ et FO, demanderesses, sont domiciliées dans le ressort du Tribunal de première instance de Liège. La SA SWITCH, société de droit français, a son siège social en France. La SA XL AIRWAYS FRANCE, société de droit français, a son siège social en France. ELVIA, société de droit suisse (selon la citation introductive d'instance), a un siège social ou d'exploitation en France. Le bagage litigieux a été perdu dans le cadre d'un transport aérien entre la France et l’Espagne (Canaries). Il existe donc des éléments d'extranéité qui conduisent le Tribunal de céans à examiner la compétence des juridictions belges.
1. L'action de mesdames MZ et FO contre SWITCH
1. En vertu de l’art. 15 du Règlement CE n° 44/2001 du Conseil concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (dit « Bruxelles I ») :
« 1. En matière de contrat conclu par une personne, le consommateur, pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, la compétence est déterminée par la présente section, sans préjudice des dispositions de l’art. 4 et de l’art. 5, point 5 :
a) ...
b) ...
c) lorsque, dans tous les autres cas, le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l’État membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet État membre ou vers plusieurs États, dont cet État membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités.
2. ...
3. La présente section ne s'applique pas aux contrats de transport autres que ceux qui, pour un prix forfaitaire, combinent voyage et hébergement ».
2. En l’espèce, mesdames MZ et FO sont des consommateurs au sens de cette disposition. En outre, la SA SWITCH propose des voyages par l’intermédiaire d'un site Internet www.partirpascher.com et mesdames MZ et FO affirment, sans être contredites, qu'elles ont consulté le site Internet www.switchtour.be pour commander le voyage. Ces sites Internet ne permettent pas la réservation de voyage on-line mais indiquent un numéro de téléphone en France pour la réservation d'un voyage. Madame FO a consulté le site Internet et commandé le voyage en cause dans le présent litige par télécopie ; le contrat a donc été conclu à distance. Par le biais d'un tel site Internet, la société SWITCH a-t-elle dirigé ses activités vers la Belgique, ce qui fonderait la compétence des juridictions belges, pays du domicile du consommateur ?
3. Dès après l’adoption du Règlement « Bruxelles I », dont l’art. 15 est une version remaniée de l’art. 13 de la Convention de Bruxelles de 1968, le Conseil et la Commission ont procédé à une déclaration conjointe concernant les arts. 15 et 73 : « Le Conseil et la Commission rappellent à cet égard que pour que l’art. 15, para. 1, point c) soit applicable, il ne suffit pas qu'une entreprise dirige ses activités vers l’Etat membre du domicile du consommateur, ou vers plusieurs Etats dont cet Etat membre, il faut également qu'un contrat ait été conclu dans le cadre de ces activités. Cette disposition concerne plusieurs méthodes de commercialisation, dont les contrats conclus à distance par l’intermédiaire d'Internet. Dans ce contexte, le Conseil et la Commission soulignent que le simple fait qu'un site Internet soit accessible ne suffit pas à rendre applicable l’art. 15, encore faut-il que ce site Internet invite à la conclusion de contrats à distance et qu'un contrat ait effectivement été conclu à distance, par tout moyen. A cet égard, la langue ou la monnaie utilisée par un site Internet ne constitue pas un élément pertinent ».
La déclaration du Conseil et de la Commission n'a pas force de loi et, à la connaissance du tribunal, la C.J.C.E. n'a pas encore eu l’occasion de se prononcer sur l’interprétation qu'il y a lieu de donner à l’art. 15 § ler, c). Selon différents auteurs, auxquels le Tribunal de céans se rallie, le fait que le site Internet « invite à la conclusion de contrats à distance », recouvre, non seulement le site interactif (sur lequel il est possible de réserver/commander on-line) mais aussi le site (parfois qualifié de passif parce qu'il ne permet pas la réservation/commande on-line) sur lequel l’opérateur mentionne un numéro de téléphone et invite à la conclusion du contrat, pour autant que le contrat ait été conclu à distance, par tout moyen. « Par tout moyen » signifie que le contrat ne doit pas nécessairement avoir été conclu par le même médium que celui par lequel le consommateur a pris connaissance des offres de l’opérateur. Ainsi, la réservation/commande par fax ou par téléphone est mise sur le même pied que la réservation on-line. La particularité que la commande n'est pas passée via le même médium que celui par lequel le consommateur a pris connaissance de l’offre n'exclut pas la nécessité de la protection.
4. En l’espèce, le Tribunal relève que, si les sites Internet de la SA SWITCH, et particulièrement celui visité par mesdames MZ et FO, ne permettent pas la conclusion d'un contrat on-line, ils invitent néanmoins clairement à la conclusion d'un contrat entrant les activités commerciales de l’agence de voyages, laquelle dirige sans conteste lesdites activités vers la Belgique notamment.
Ainsi :
– les sites invitent à effectuer la réservation du voyage choisi en indiquant un numéro de téléphone avec l’invitation « Offrez-vous ce luxe 24H/24 – 7J/7 » ou « Réservation 24H/24 – 7J/7 » ;
– le site www.partirpascher.com indique textuellement « 1er Tour Opérateur français sur Internet »... « Notre philosophie ? Offrir à tous le moyen de voyager moins cher »... « Comment ? En commercialisant en direct toutes nos offres, sans intermédiaire, par le site Internet : partirpascher.com » ;
– le site www.switchtour.be a une extension «.be », soit un site miroir, propre à la Belgique ;
– l’agence a effectivement conclu un contrat à distance avec des consommateurs belges.
Par conséquent, l’art. 15 du Règlement « Bruxelles I » étant applicable au contrat conclu entre la SA SWITCH et mesdames MZ et FO, celles-ci peuvent, en vertu de l’art. 16 dudit Règlement, intenter l’action contre la première devant le Tribunal du lieu où elles sont domiciliées, soit celui de Liège.
5. Enfin, la clause attributive de juridiction reprise dans les conditions générales de vente de la SA SWITCH selon laquelle « En cas de litige, les Tribunaux dans le ressort desquels le siège social est situé seront seuls compétentes » est inopérante.
L'art. 17 du Règlement « Bruxelles I » prévoit en effet :
« Il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions :
1) postérieures à la naissance du différend, ou
2) qui permettent au consommateur de saisir d'autres tribunaux que ceux indiqués à la présente section, ou
3) qui, passées entre le consommateur et son cocontractant ayant, au moment de la conclusion du contrat, leur domicile ou leur résidence habituelle dans un même Etat membre, attribuent compétence aux tribunaux de cet Etat membre, sauf si la loi de celui-ci interdit de telles conventions ».
Le cas d'espèce ne rencontre aucune de ces hypothèses permettant une dérogation à l’art. 16 précité.
6. Le Tribunal de céans est donc compétent pour connaître de l’action de mesdames MZ et FO dirigée contre la SA SWITCH sur base du contrat conclu entre elles.
2. L'action de mesdames MZ et FO contre XL AIRWAYS FRANCE et l’action en garantie de SWITCH contre XL AIRWAYS FRANCE
1. Même en supposant qu'un contrat de transport existe entre mesdames MZ et FO, l’art. 15.3. du Règlement « Buxelles I » ne s'applique pas en l’espèce. Selon cette disposition, la compétence déterminée par l’art. 16 du Règlement « Bruxelles I » s'applique uniquement aux contrats de transport qui, pour un prix forfaitaire, combinent voyage et hébergement. Or, en l’espèce, la SA XL AIRWAYS FRANCE ne s'est engagée que dans le cadre d'un transport, sans combinaison avec un hébergement.
2. En vertu de l’art. 1.1. de la Convention du 28 mai 1999 pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international, faite à Montréal, approuvée par la loi du 13 mai 2003 : « La présente convention s'applique à tout transport international de personnes, bagages ou marchandises, effectué par aéronef contre rémunération. Elle s'applique également aux transports gratuits effectués par aéronef par une entreprise de transport aérien ». L'art. 17.2. de la Convention instaure un système de présomption de responsabilité du transporteur notamment pour les dommages survenus en cas de destruction, perte ou avarie de bagages enregistrés, « par cela seul que le fait qui a causé la destruction, la perte ou l’avarie s'est produit à bord de l’aéronef ou au cours de toute période durant laquelle le transporteur avait la garde des bagages enregistrés ».
Selon l’art. 33.1. de cette Convention : « L'action en responsabilité devra être portée, au choix du demandeur, dans le territoire d'un des Etats parties, soit devant le tribunal du domicile du transporteur, du siège principal de son exploitation ou du lieu où il possède un établissement par le soin duquel le contrat a été conclu, soit devant le tribunal du lieu de destination ».
3. En outre, l’art. 71 du Règlement « Bruxelles I » prévoit que ledit Règlement « n'affecte pas les conventions auxquelles les Etats membres sont parties et qui, dans des matières particulières, règlent la compétence judiciaire, la reconnaissance ou l’exécution des décisions ». De même, l’art. 3.1. du Règlement CE n° 2027/97 du 9 octobre 1997 du Conseil relatif à la responsabilité des transporteurs aériens en ce qui concerne le transport aérien de passagers et leurs bagages (modifié par le Règlement CE n° 889/2002 du 13 mai 2002 du Conseil) prévoit que « La responsabilité d'un transporteur aérien communautaire envers les passagers et leurs bagages est régie par toutes les dispositions de la convention de Montréal relatives à cette responsabilité ». Par conséquent, les Conventions signées par les Etats contractants qui, dans des matières particulières, règlent la compétence judiciaire, la reconnaissance ou l’exécution des décisions, priment le Règlement « Bruxelles I ».
Tel était déjà le cas sous l’empire de la Convention de Bruxelles de 1968 en son art. 57.
Or, l’art. 71 du Règlement « Bruxelles I » reproduit l’art. 57 sous une forme remaniée qui ne laisse place à aucune interprétation. La C.J.C.E. s'est prononcée à plusieurs reprises sur la portée de l’art. 57 de la Convention de Bruxelles en considérant que l’objectif de l’exception introduite par cet art. 57 consiste à faire respecter les règles de compétence prévues par des conventions spéciales, ces règles ayant été édictées en tenant compte des spécificités des matières qu'elles concernent. Au vu de cet objectif, l’art. 57 doit être entendu comme écartant uniquement l’application des dispositions de la Convention de Bruxelles à des questions régies par une convention spéciale. Il y a dès lors lieu de considérer que la Convention de Montréal prime le Règlement de « Bruxelles I ».
4. L'art. 33.1. (à la différence de l’art. 33.2.) de la Convention de Montréal emploie le verbe « devoir » de sorte que les règles de compétence qu'il détermine ont un caractère impératif, l’énumération des juridictions possibles est exhaustive, ce qui exclut qu'une autre juridiction puisse être saisie, serait-elle celle d'un codéfendeur. Les règles de compétence lorsqu'il y a connexité ou action en garantie prévues par l’art. 6 du Règlement « Bruxelles I » ne permettent pas de déroger ni à une clause d'élection de for valable au regard du Règlement, ni aux Conventions auxquelles les Etats membres sont parties et qui, dans des matières particulières, règlent la compétence judiciaire, la reconnaissance ou l’exécution des décisions, visées par l’art. 71 du Règlement, dont la Convention de Montréal.
5. Il résulte des considérations qui précèdent que les juridictions belges ne sont pas compétentes pour connaître de l’action de mesdames MZ et FO ni de celle de l’agence SWITCH dirigées contre le transporteur XL AIRWAIS FRANCE que ce soit directement, par la connexité ou via une action en garantie.
3. L'action de mesdames MZ et FO contre ELVIA
En matière d'assurances, l’art. 9.1. du Règlement « Bruxelles I » prévoit que l’assureur domicilié sur le territoire d'un Etat membre peut être attrait, notamment, « dans un autre Etat membre, en cas d'actions intentées par le preneur d'assurance, l’assuré ou un bénéficiaire, devant le tribunal du lieu où le demandeur a son domicile ».
Tel est le cas en l’espèce, outre que ELVIA ne soulève pas d'exception d'incompétence.
Le Tribunal de céans est compétent.
4. L'action subrogatoire de ELVIA contre SWITCH et XL AIRWAYS FRANCE
Les parties concernées ne se sont pas expliquées sur la compétence des juridictions belges, tandis que le Tribunal de céans n'est pas territorialement compétent pour connaître de l’action de mesdames MZ et FO dirigée contre la SA XL AIRWAYS FRANCE. Si les juridictions belges sont compétentes, il y a lieu en outre que les parties concernées s'expliquent sur la loi applicable, en tenant compte, s'il échet, des conditions générales du contrat d'assurance. La cause n'étant pas en état d'être jugée, il sera réservé à statuer sur l’action subrogatoire.
IV. LA LOI APPLICABLE
1. Les conditions générales de vente de la SA SWITCH ne comportent pas de clause d'élection de for ou de détermination du droit applicable. Selon la jurisprudence et la doctrine, si les parties n'ont pas fait choix de la loi applicable, c'est au juge qu'il appartient de le faire. Les auteurs indiquent toutefois qu'une référence privilégiée est faite à la loi du pays de la résidence habituelle du consommateur. La Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles va également dans ce sens. Le juge aura donc à l’esprit, à défaut de clause expresse, comme guide d'interprétation, la protection du consommateur, partie faible du contrat. La loi belge qui s'applique au contrat de voyage est la loi du 16 février 1994 régissant le contrat d'organisation de voyages et le contrat d'intermédiaire de voyages. Il s'agit d'une loi impérative qui laisse néanmoins une place pour l’autonomie de volonté des parties pour autant qu'elle ne limite pas les droits du voyageur ou alourdisse ses obligations (art. 3).
Selon l’art. 2 de cette loi : « § 1er. La présente loi est applicable aux contrats d'organisation et d'intermédiaire de voyages vendus ou offerts en vente en Belgique. §2. Si un intermédiaire de voyages agit en qualité d'intermédiaire pour un organisateur de voyages non établi en Belgique, il est considéré comme l’organisateur de voyages vis-à-vis du voyageur ».
Selon E. MONTERO, il ne fait aucun doute que le contrat souscrit par un consommateur résidant en Belgique, après avoir consulté le site Internet d'une agence de voyages étrangère, doit être soumis à la loi belge, en vertu de l’art. 2 de la loi. En outre, les travaux préparatoires de la loi indiquent que l’art. 2 « vise à rendre la proposition applicable aux organisateurs de voyages et aux intermédiaires de voyages tant belges qu'étrangers, établis en Belgique ou non, pour autant qu'ils offrent leurs services à des voyageurs protégés par la loi belge. Le para. 2 a été ajouté pour assurer une meilleure protection aux voyageurs ».
Par conséquent, la loi belge du 16 février 1994 est la loi applicable en l’espèce.
2. Dans ses conclusions, ELVIA se réfère à la loi belge du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre.
Partant, elle opte pour l’application de la loi belge, renonçant de la sorte à une éventuelle clause d'élection de for ou de détermination du droit applicable qui serait prévue dans ses conditions générales. Aucune disposition impérative et/ou d'ordre public ne semblant s'y opposer, il y a lieu d'appliquer la loi belge.
V. JONCTION
Les causes portant les numéros de rôle 06/5646/A et 07/933/A sont connexes au sens de l’art. 30 du Code judiciaire de sorte qu'une bonne administration de la justice commande de les joindre.
VI. LE FOND
1. Les conditions générales et particulières du contrat d'assurance
Mesdames MZ et FO estiment que les conditions générales et particulières du contrat d'assurance ne leur sont pas opposables parce qu'elles ne les ont reçues qu'au moment de l’embarquement, soit après la conclusion du contrat. ELVIA s'en réfère à la sagesse du Tribunal. En droit commun, la force obligatoire des conditions générales des contrats est subordonnée à une double condition : d'une part, la partie à laquelle elles sont opposées doit avoir eu la possibilité d'en prendre connaissance préalablement à la conclusion du contrat et, d'autre part, son acceptation, si elle peut être tacite, doit être certaine. La charge de la preuve que les conditions générales et particulières ont été connues et acceptées pèse sur celui qui les invoque, en l’occurrence ELVIA. Les conditions générales et particulières du contrat d'assurance souscrit par mesdames MZ et FO auprès d'ELVIA, par l’intermédiaire de la SA SWITCH, pouvaient être consultées sur le site Internet de celle-ci en cliquant sur l’onglet « nos garanties » situé en bas de chaque page du site, sans qu'aucune mention ne renvoie toutefois à cet onglet, l’existence de ces conditions n'étant du reste mentionnée sur aucune des pages du site. L'accessibilité de ces conditions est dès lors parfaitement théorique puisqu'il faut presque deviner que l’onglet « nos garanties » sur le site Internet de la SA SWITCH comporte les conditions du contrat d'assurance d'ELVIA.
En outre, le Tribunal relève que le lien vers les conditions d'assurance ne figure pas dans le processus de commande, avant la conclusion définitive du contrat, de sorte que tout intéressé peut conclure le contrat sans passer par la lecture (et l’acceptation) des conditions d'assurance. Enfin, aucun élément soumis au Tribunal ne permet d'établir que les conditions d'assurance actuellement accessibles sur le site Internet de la SA SWITCH sont celles qui étaient applicables lors de la conclusion du contrat par mesdames MZ et FO, d'autant qu'il apparaît de surcroît que l’assureur n'est plus la compagnie ELVIA. Rien n'indique que la version papier déposée par ELVIA correspond à des conditions d'assurance connues et acceptées, même tacitement, par mesdames MZ et FO avant la conclusion du contrat. La version papier déposée par la SA SWITCH provient semble-t-il d'une impression des pages de son site Internet mais on ne sait à quelle date et, de surcroît, elle est manifestement incomplète. Il résulte des considérations qui précèdent qu'ELVIA ne rapporte pas la preuve que les conditions générales et particulières qu'elle prétend opposer à mesdames MZ et FO ont été acceptées de manière certaine par celles-ci ; elle ne le soutient du reste pas dans ses conclusions.
Par conséquent, ces conditions ne sont pas opposables en l’espèce et elles sont dès lors écartées des débats.
2. L'intervention d'ELVIA
1. Ce n'est pas parce que les conditions générales et particulières du contrat d'assurance ne sont pas opposables que le contrat n'existe pas. Aucune des parties ne remet en cause l’existence d'un contrat d'assurance « perte de bagages » par mesdames MZ et FO. Cette assurance apparaît du reste sur la demande d'inscription adressée à l’organisateur de voyage et est confirmée sur la facture. Les parties s'accordent aussi pour considérer que le bagage est définitivement perdu de sorte que le sinistre assuré s'est réalisé, sans que ELVIA puisse remettre en cause son existence et sans que le Tribunal ne doive examiner sa réalité. En outre, ELVIA ne peut prétendre à l’application des sanctions prévues par l’art. 21 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre dès lors qu'elle ne démontre pas l’existence d'un préjudice dans son chef ou l’intention frauduleuse de l’assuré.
2. A défaut de conditions générales et particulières d'assurance, il y a lieu de se référer à cette loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre pour déterminer les caractéristiques de l’assurance en question et son étendue. Il s'agit en l’espèce d'une assurance de dommages à caractère indemnitaire. Contrairement à ce que prétend la SA SWITCH, l’assurance litigieuse ne prévoit pas une indemnisation forfaitaire. D'une part, toute assurance de dommages à un caractère indemnitaire (art. 51 de la loi de 1992), d'autre part, même si les conditions d'assurance de ELVIA étaient applicables en l’espèce (dans les versions déposées par elle et la SA SWITCH), il en ressort que l’indemnisation n'est nullement forfaitaire mais qu'un plafond est prévu.
En vertu de l’art. 39 de la loi précitée : « La prestation due par l’assureur est limitée au préjudice subi par l’assuré. Ce préjudice peut notamment consister dans la privation de l’usage du bien assuré ainsi que dans le défaut de profit espéré ».
L'art. 52 met les frais de sauvetage à charge de l’assureur soit, en l’espèce, les frais découlant des mesures urgentes et raisonnables prises d'initiative par l’assuré pour prévenir ou atténuer les conséquences du sinistre, lorsqu'ils ont été exposés en bon père de famille, alors même que les diligences faites l’auraient été sans résultat. En l’espèce, mesdames MZ et FO peuvent prétendre, à l’égard de la compagnie d'assurance, à une indemnisation correspondant à la valeur de remplacement des objets perdus au moment de la perte et au remboursement des frais exposés pour acheter les objets de première nécessité afin d'atténuer les conséquences néfastes de la perte du bagage.
3. La responsabilité de la SA SWITCH
3.1. Rappel des dispositions applicables
1. Le contrat conclu entre mesdames MZ et FO et la SA SWITCH est un contrat d'organisation de voyages relevant du champ d'application de la loi du 16 février 1994 régissant le contrat d'organisation de voyages et le contrat d'intermédiaire de voyages.
2. En vertu de l’art. 17 de cette loi : « L'organisateur de voyages est responsable de la bonne exécution du contrat conformément aux attentes que le voyageur peut raisonnablement avoir sur la base des dispositions du contrat d'organisation de voyages et des obligations découlant de celui-ci, indépendamment du fait que ces obligations doivent être remplies par lui-même ou d'autres prestataires de services, et ce sans préjudice du droit de l’organisateur de voyages de poursuivre les autres prestataires de services en responsabilité. L'organisateur de voyages est responsable des actes et négligences de ses préposés et représentants, agissant dans l’exercice de leurs fonctions, autant que de ses propres actes et négligences ».
L'organisateur de voyages a donc, notamment, l’obligation de transporter les personnes et les bagages, ce qui inclut celle de restituer lesdits bagages, et un manquement à cette obligation lui est imputable, même si elle devait être remplie par un autre prestataire.
3. Selon l’art. 18 de la même loi, l’organisateur de voyage est responsable de tout dommage subi par le voyageur en raison du non-respect de tout ou partie de ses obligations (§ 1er). Il peut toutefois s'exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que les manquements soit sont imputables au voyageur, soit sont imprévisibles ou insurmontables et imputables à un tiers qui est étranger aux prestations visées au contrat, soit sont imputables à un cas de force majeur (§2). Dans les deux cas néanmoins, il est tenu, durant l’exécution du contrat, de faire diligence pour venir en aide et prêter assistance au voyageur en difficulté (§3).
4. Les obligations visées par les arts. 17 et 18, § 1er et 2, de la loi de 1994 sont des obligations découlant du contrat selon les attentes raisonnables du voyageur par rapport à ces obligations. Le voyageur doit donc seulement prouver l’existence de l’obligation contractuelle qu'il estime inexécutée et le fait que le résultat promis (eu égard à des attentes raisonnables) n'a pas été atteint ; il ne doit pas en outre prouver la circonstance que l’organisateur a commis une faute. C'est à l’organisateur de tenter de renverser cette présomption de responsabilité en se fondant exclusivement sur les cas d'exonération de responsabilité de l’art. 18, §2 de la loi. En revanche, l’obligation générale d'assistance visée par l’art. 18, §3, de la loi de 1994 est une obligation de moyen qui implique que, compte tenu des circonstances concrètes, l’organisateur de voyage doit se comporter comme un organisateur raisonnablement consciencieux et faire diligence pour venir en aide au voyageur, peu importe le motif pour lequel celui-ci est en difficulté, que l’inexécution du contrat soit en définitive imputée ou non à l’organisateur.
5. Enfin, en vertu de l’art. 19 de la loi :
« § 1er. ... §2. L'organisateur de voyages ne peut exclure ou limiter sa responsabilité pour les dommages non corporels découlant de son fait ou de sa négligence, de l’intention de causer le dommage ou d'une faute grave. §3. Si une prestation faisant l’objet du contrat de voyage est soumise à l’application d'une convention internationale, l’organisateur de voyages peut exclure ou limiter sa responsabilité conformément à la convention internationale qui régit ces prestations. §4. L'organisateur de voyages est également tenu, en cas de non-respect d'une de ses obligations, à un dédommagement équitable de la perte de jouissance du voyage. §5. ... ».
L'art. 17.2. de la Convention de Montréal instaure une présomption de responsabilité qui pèse sur le transporteur pour le dommage survenu notamment en cas de perte de bagages enregistrés, au cours de toute période durant laquelle le transporteur en avait la garde. L'art. 22.2. de cette Convention limite toutefois cette responsabilité « à la somme de 1.000 droits de tirage spéciaux par passager, sauf déclaration spéciale d'intérêt à la livraison faite par le passager au moment de la remise des bagages enregistrés au transporteur et moyennant le paiement éventuel d'une somme supplémentaire ». Cette limitation peut aussi être invoquée par l’organisateur de voyage dans sa relation avec le voyageur (art. 19, §3, de la loi du 1994).
3.2. Application au cas d'espèce
1. Les conditions générales de vente de la SA SWITCH prévoient, sous le titre « responsabilité », que les transporteurs « conservent à l’égard des voyageurs leurs propres responsabilités » et « la compagnie aérienne et la société maritime assument seules la responsabilité de tous les préjudices, dommages et accidents pouvant survenir aux voyageurs, à leurs animaux et leurs bagages... ». La clause contractuelle exonératoire de responsabilité en cas de responsabilité du transporteur ne peut toutefois s'appliquer que conformément à la Convention de Montréal, laquelle s'applique à la relation entre mesdames MZ et FO et la SA SWITCH (art. 19, §3, de la loi). La SA SWITCH ne peut être condamnée, dans le cadre de l’obligation qui pèse sur le transporteur, à une indemnisation plus élevée que le montant pour lequel la compagnie aérienne peut être rendue responsable, soit 1.000 droits de tirage spéciaux (1.194 EUR en janvier 2006 ) par passager, puisqu'il n'y a pas eu en l’espèce de déclaration spéciale d'intérêt faite au transporteur par mesdames MZ et FO. Mais, même dans ce cas, la SA SWITCH est également tenue à un dédommagement équitable pour la perte de la jouissance du voyage (art. 19, §4, de la loi).
2. La SA SWITCH avait l’obligation de transporter les personnes et les bagages, ce qui inclut celle de restituer lesdits bagages, que cette obligation doive être remplie par elle-même ou par le transporteur. Aucun fait exonératoire de l’acheteur de voyage ou d'un tiers autre que le transporteur, ou cas de force majeur n'est établi ni même allégué par la SA SWITCH de sorte qu'il est inopérant pour elle de soutenir qu'elle n'a commis aucune faute dans l’exécution des prestations lui incombant.
3. Mesdames MZ et FO reprochent en outre à la SA SWITCH de ne pas les avoir aidées et de ne leur avoir prêté aucune assistance lors de la perte du bagage et pendant tout le séjour. Il résulte des pièces déposées que la SA SWITCH a été avertie du retard dans la livraison du bagage dès le 27 février 2006. Hormis une déclaration de sinistre qu'elle aurait faite auprès de ELVIA, aucun élément du dossier ne révèle une intervention de la SA SWITCH avant le courrier du 2 mars 2006 qu'elle a adressé à madame FO à son domicile en Belgique... et dans lequel elle se borne à renvoyer les intéressées vers ELVIA et la SA XL AIRWAYS. Aucune pièce ne démontre une quelconque intervention de l’organisateur de voyages pour accélérer la recherche du bagage. De surcroît, elle a renvoyé les intéressées vers le transporteur, en alléguant que le transporteur est seul responsable, ce qui est rigoureusement inexact. Il n'est pas non plus établi que la SA SWITCH a aidé ou prêté une quelconque assistance à mesdames MZ et FO, lesquelles pouvaient légitimement s'attendre à ce que le problème du bagage soit pris en charge par l’organisateur de voyages. Les éléments du dossier établissent que c'est madame FO qui a dû effectuer toutes les démarches, depuis le lieu de séjour, pour tenter de récupérer le bagage et faire face aux besoins de première nécessité.
En outre, les informations qui étaient communiquées aux intéressées étaient incomplètes ou inexactes et il n'apparaît pas que la SA SWITCH se soit informée ou préoccupée d'une quelconque manière du problème, laissant les voyageurs tenter de le régler seuls. Il en résulte un manquement fautif d'organisation et de diligence et une mauvaise exécution du contrat de la part de la SA SWITCH qui ont causé à mesdames MZ et FO un préjudice dont elles peuvent réclamer la réparation. Elles n'ont pas eu la jouissance normale de prestations auxquelles elles avaient droit en raison des pertes de temps, soucis et difficultés qui leur ont été causés, par manque de disposition des effets personnels contenus dans la valise perdue et des démarches pour la récupérer.
4. En conclusion :
Avec ou sans faute ou négligence de sa part, la SA SWITCH est responsable de la perte du bagage par le transporteur. En outre, elle a commis une faute ou une négligence qui engage sa responsabilité, tant sur base de l’art. 1134 du Code civil que sur base des arts. 17, 18 et 19 de la loi du 16 février 1994 régissant le contrat d'organisation de voyages et le contrat d'intermédiaire de voyages.
4. Le dommage allégué par mesdames MZ et FO, son évaluation et son imputabilité
1. La perte du bagage
Il appartient à mesdames MZ et FO de prouver l’évaluation de leur dommage. Mesdames MZ et FO, et l’enfant de celle-ci, sont partis en voyage avec trois bagages enregistrés, soit une poussette, une grosse valise et une petite. La grosse valise n'est jamais arrivée. Il ne peut être sérieusement contesté que la grosse valise contenait les effets de deux adultes et un enfant d'un an, étant le seul bagage de dimension importante emporté pour les trois voyageurs. En outre, si l’attestation de monsieur P émane certes d'un proche des intéressées, il n'y a pas de raison de remettre en cause ce qu'il déclare avoir vu comme bagages lors du départ à Roissy. Mesdames MZ et FO s'abstiennent toutefois de communiquer au Tribunal un relevé des objets emportés dans cette valise ; elles se bornent à postuler un montant de 10.000 EUR évalué ex aequo et bono.
La circonstance que madame FO s'habillerait avec des vêtements coûteux, ou aurait acheté, avant le voyage, des vêtements coûteux pour elle-même et de nouveaux vêtements pour son fils, ne démontre pas que le bagage perdu contenait de tels vêtements. Cela étant, il ne peut être exigé que mesdames MZ et FO produisent, pour être indemnisées de leur préjudice, la preuve du paiement et de la date des achats qu'elles ont emportés dans le bagage perdu. Il n'est en effet pas habituel de conserver la preuve des achats vestimentaires et des ustensiles de toilette. En outre, même si ces documents étaient produits, ils ne démontreraient pas encore que lesdits achats ont effectivement été emportés dans la valise. Par conséquent, seule une évaluation ex aequo et bono est possible. Néanmoins, le montant de 10.000 EUR postulé n'est pas démontré et est exagéré, d'autant que si elles emportaient des objets de valeurs, comme elles le soutiennent, mesdames MZ et FO devaient agir avec prudence soit en les déclarant au transporteur, soit en les conservant avec elle.
La production d'un relevé des objets contenus dans la valise, éventuellement avec des indices d'achats récents, aurait pu guider le Tribunal vers une évaluation aussi proche que possible de la réalité. A défaut, le Tribunal retiendra que la valise contenait des vêtements, chaussures et ustensiles de toilette nécessaires pour un séjour de 8 jours dans un pays ensoleillé, et en retenant un cœfficient de vétusté de l’ordre de 20%. Enfin, la présomption de responsabilité du transporteur pour la perte de bagages ne s'étend pas au-delà d'une somme de 1.194 EUR par passager, si aucune déclaration spéciale ne lui a été faite au moment de la remise des bagages. Cette limite s'impose aux voyageurs à l’égard également de l’organisateur de voyages.
A défaut d'autres éléments, il sera alloué à mesdames MZ et FO une somme forfaitaire globale de 2.250 EUR, à majorer des intérêts compensatoires et moratoires à partir du 26 février 2006. Cette somme doit être mise à charge de ELVIA, en sa qualité d'assureur « perte de bagage ».
Cette somme doit aussi être mise à charge la SA SWITCH, en sa qualité d'organisateur de voyages ; la somme allouée n'excède pas la limite fixée par le Convention de Montréal que la SA SWITCH est autorisée à invoquer. La SA SWITCH et ELVIA seront condamnées in solidum puisque, d'une part, elles sont condamnées à indemniser mesdames MZ et FO pour des causes différentes mais chacune pour tout le dommage et le même dommage et que, d'autre part, aucune disposition légale ou contractuelle ne prévoit la solidarité (art. 1202 du Code civil).
2. Les frais exposés pour se procurer les objets de première nécessité pendant le séjour
Il ne peut être contesté que, sans leurs effets personnels sur place, mesdames MZ et FO ont dû acheter d'urgence des objets de toilettes, des vêtements, des chaussures de première nécessité et pour couvrir tout le séjour (8 jours) puisque le bagage n'a jamais été retrouvé. Il y a bien un préjudice en relation causale avec la perte du bagage puisque, sans cette perte, elles n'auraient pas dû faire des achats d'objets qu'elles possédaient dans la valise perdue. Elles demandent une somme provisionnelle de 1.782,14 EUR et déposent diverses pièces à cet égard. Ces pièces sont toutefois partiellement illisibles ou mentionnent des objets ou services sans qu'il soit possible de les identifier, et donc d'en évaluer la nécessité.
En outre, il y a lieu de tenir compte du fait que les achats sont restés dans le patrimoine des intéressées. Si les frais de GSM peuvent être admis dans leur principe puisque mesdames MZ et FO démontrent avoir eu plusieurs contacts téléphoniques relatifs à la perte du bagage, le montant sollicité de 349,20 EUR ne peut être retenu puisqu'il comporte, selon la facture déposée, tous les appels (195) et messages (70) à l’étranger du 15 février au 14 mars 2006 !
Enfin, mesdames MZ et FO ne justifient pas la raison pour laquelle le montant alloué devrait être provisionnel alors que les frais ont été déboursés depuis plus de deux ans. Il sera alloué à mesdames MZ et FO une somme forfaitaire globale et définitive de 500 EUR, à majorer des intérêts compensatoires et moratoires à partir du 1er mars 2006, date moyenne. Cette somme doit être mise à charge de ELVIA, en sa qualité d'assureur. Une responsabilité personnelle dans le chef de la SA SWITCH étant reconnue, cette somme doit également être mise à sa charge, in solidum avec ELVIA pour les mêmes raisons que celles indiquées ci-dessus.
3. La perte de la jouissance du voyage
Malgré la perte du bagage, mesdames MZ et FO ont pu profiter de leur séjour, grâce notamment à l’achat des objets de première nécessité. Si un trouble de jouissance consécutif à la perte du bagage peut être admis puisqu'elle n'ont pas eu la jouissance normale de prestations auxquelles elles avaient droit en raison des pertes de temps, soucis et difficultés qui leur ont été infligés, il ne peut être question d'un remboursement du prix du voyage. Il sera alloué à mesdames MZ et FO une somme forfaitaire globale de 300 EUR, à majorer des intérêts compensatoires et moratoires à partir du 1er mars 2006, date moyenne. Aucun élément ne permet au Tribunal de considérer que le trouble de jouissance était couvert par l’assurance contractée avec ELVIA. Qu'elle ait ou non commis une faute ou une négligence, la perte de jouissance du voyage doit être mise à charge de la SA SWITCH.
4. La perte de jouissance, après le voyage, des objets perdus
Le dommage subi pour la perte des objets perdus est réparé par équivalent, par l’allocation d'une somme forfaitaire qui sera majorée des intérêts à partir de la perte. Les objets sont donc censés être remplacés à ce moment de sorte qu'il n'y a plus de trouble de jouissance ensuite.
5. L'appareil photographique
Mesdames MZ et FO demandent aussi le remboursement d'un appareil photographique d'un montant de 330 EUR acheté par madame FO le 20 mars 2006 selon la facture produite, soit après son retour de voyage. Selon elles, le bagage perdu contenait un chargeur d'appareil photographique. Il ne résulte d'aucun élément du dossier que le chargeur perdu, qui provenait semble-t-il d'un appareil acquis le 23 août 2003 pour un montant de 505 EUR, n'était pas remplaçable. Il ne peut être question d'allouer un quelconque montant pour l’achat d'un nouvel appareil photographique.
VII. LES DEPENS
Les dépens sont mis à charge de la partie qui succombe (art. 1017 du Code judiciaire).
1.Mesdames MZ et FO ainsi que la SA SWITCH doivent être condamnées à l’indemnité de procédure à l’égard de la SA XL AIRWAYS FRANCE, laquelle sollicite un montant non contesté de 1.100 EUR. Ce montant lui sera alloué.
2. Mesdames MZ et FO ont renoncé à leur demande de condamnation aux frais de défense compte tenu de l’entrée en vigueur du nouvel art. 1022 du Code judiciaire. Outre les frais de citation non contestés, mesdames MZ et FO postulent une indemnité de procédure d'un montant de 1.100 EUR, soit le montant de base pour les actions portant sur des demandes évaluables en argent situées entre 10.000,01 EUR et 20.000,- EUR. La SA SWITCH et ELVIA ne formulent pas de demande de réduction, fût-ce à titre subsidiaire. Ce montant sera alloué, rien ne s'y opposant.
3. Enfin, le Tribunal rappelle que, selon l’art. 1020 du Code judiciaire, la condamnation aux dépens se divise de plein droit par tête, à moins que le jugement n'en ait disposé autrement ou si la condamnation principale emporte elle-même solidarité, ce qui n'est pas le cas en l’espèce.
VIII. L'EXECUTION PROVISOIRE
Sous peine de porter atteinte au droit du justiciable d'exercer les voies de recours organisées par le législateur, le juge ne peut accueillir la demande d'exécution provisoire que si elle est fondée soit sur une disposition prescrivant l’exécution provisoire de droit, soit sur l’existence de circonstances particulières, telles notamment l’existence d'un engagement en soi incontesté du défendeur originaire, un état de nécessité rendant indispensable cette mesure, par exemple l’indigence du créancier ou le risque d'insolvabilité du débiteur, ou le retard dans l’instruction de la cause dû à l’attitude dilatoire d'une partie au procès.
Mesdames MZ et FO invoquent le caractère incontestable du dommage et la nécessité d'éviter les conséquences « d'une faillite ou autre ». Si le dommage était incontestable, selon mesdames MZ et FO, il reste qu'il était contesté. Les risques « d'une faillite ou autre » ne sont pas explicités ni démontrés. Le Tribunal ne possède aucun élément quant à une éventuelle indigence des créanciers. Aucune circonstance particulière n'étant établie, la demande est rejetée.
PAR CES MOTIFS,
Le Tribunal statuant contradictoirement,
Vu la loi du 15 juin 1935 sur l’emploi des langues en matière judiciaire,
Ecartant comme non fondées toutes autres conclusions plus amples ou contraires,
Joint les causes portant les numéros de rôle 06/5646/A et 07/933/A.
Se déclare territorialement incompétent pour connaître de l’action de mesdames MZ et FO contre la SA XL AIRWAYS FRANCE et de l’action de la SA SWITCH contre la SA XL AIRWAYS FRANCE.
Condamne mesdames MZ et FO ainsi que la société de droit français SA SWITCH aux dépens liquidés par la société de droit français SA XL AIRWAYS FRANCE à l’indemnité de procédure d'une somme de 1.100 EUR.
Dit l’action de mesdames MZ et FO contre la SA SWITCH et contre ELVIA recevable et partiellement fondée.
Condamne la société de droit suisse ELVIA SOCIETE D'ASSURANCE ET DE VOYAGE ET D'ASSISTANCE et la société de droit français SA SWITCH, in solidum, à payer à mesdames MZ et FO une somme de 2.250 EUR, à majorer des intérêts compensatoires aux
taux légaux à partir du 26 février 2006 jusqu'au présent jugement, et une somme de 500 EUR, à majorer des intérêts compensatoires aux taux légaux à partir du 1er mars 2006 jusqu'au présent jugement.
Le montant de ces condamnations, augmenté des intérêts compensatoires, sera en outre majoré des intérêts moratoires au taux légal depuis le jour du présent jugement jusqu'à complet paiement.
Condamne la société de droit français SA SWITCH à payer à mesdames MZ et FO une somme de 300 EUR, à majorer des intérêts compensatoires aux taux légaux à partir du 1er mars 2006 jusqu'au présent jugement.
Le montant de cette condamnation, augmenté des intérêts compensatoires, sera en outre majoré des intérêts moratoires au taux légal, depuis le jour du présent jugement jusqu'à complet paiement.